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Loi et legislation

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Les différentes lois évoquées ci-dessus temoignent de l'ajustement progressif des pratiques et des moeurs liés à la fin de vie et aux soins palliatifs. 

 

Au fur et à mesure de votre lecture, vous pouvez retrouver les textes de lois correspondant au sujet abordé en passant la souris sur les drapeaux. 

Respect du droit à l’autodétermination et protection du droit à la vie, ces deux obligations balisent l’action des états en matière de fin de vie. L’article 2 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) le garantit, “le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi”. Ce rôle de défenseur implique de nous protéger d’autrui, mais aussi de l’autorité publique.

 

Une tâche d’autant plus importante dans le domaine médical. Il faut alors garantir au patient le respect de ses droits, mais également protéger les professionnels de santé dans l’exercice de leur métier. La tension entre la protection du droit à la vie et la défense du droit de chacun à l’autodétermination est grande.

 

Comme le relève la Cour constitutionnelle belge en 2015, le droit à l’autodétermination est “le droit d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment sa vie doit prendre fin, à condition qu’il soit en mesure de former librement sa volonté à ce propos et d’agir en conséquence”. 

 

Droit fondamental de la personne humaine, le droit à l’autodétermination tempère l’obligation des Etats à protéger la vie. Dans un avis du 29 janvier 2020, le Conseil d’Etat relève d’ailleurs que “cette obligation [...] n’implique nullement pour l’Etat de protéger la vie en toute circonstance contre le gré de l’intéressé” (Conseil d’Etat Belge, Avis du 29 janvier 2020 sur la proposition de loi modifiant la législation relative à l’euthanasie). La volonté individuelle doit donc être écoutée, respectée et mise en oeuvre.

 

“Il faut être indulgent avec le législateur, son travail est difficile. Surtout s’agissant de la fin de vie”, plaide ainsi André Moine. Maître de conférence en droit public, il poursuit : “le législateur doit trouver un juste équilibre entre des intérêts parfois divergents”. Une mission complexe mais nécessaire au maintien de l’Etat de droit.

 

Depuis peu, parlementaires français, belges et wallons se livrent à cet exercice d’équilibriste. En 20 ans, on a vu des postures politiques se dessiner et s’affirmer. Les gouvernements successifs sont parvenus à préciser les possibles et les interdits en matière de fin de vie. A Bruxelles, Luxembourg et Paris, des différences importantes existent. En premier lieu, la dépénalisation de l’euthanasie qui, si elle n’est pas le seul enjeu de la fin de vie aujourd’hui, en constitue l’un des principaux points de débat.

 

Si nos voisins du Benelux se distinguent de la France sur certaines grandes problématiques de la fin de vie, tous trois s’accordent sans concertation sur une même définition de cette phase ultime de la vie.

 

La fin de vie est “la phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, qu’elle qu’en soit la cause”.

 

 


 

Un exercice legislatif complexe ...

Le renforcement des droits des patients est un mouvement commun à nos trois pays, une volonté assumée de démocratiser la relation thérapeutique. André Moine pointe cependant la difficulté pour le législateur de trouver un juste milieu entre les différentes parties. “Il s’agit d'un enjeu social, philosophique, moral relatif à la vie et à la mort. Ce sont des questions abyssales. On va donc nécessairement avoir des réponses sociales complexes”, selon le Maître de conférence en droit public à l’Université de Lorraine. La traduction légale de ces propositions sociales est nécessairement discutable. Les réponses à apporter aux diverses issues de la fin de vie ne peuvent faire consensus.

 

Les critiques adressées aux parlementaires varient de chaque côté des frontières. En France, les politiques sont souvent taxés d’hypocrisie. Entendu dans la bouche de différents acteurs politiques et sociaux, cet argument est partie intégrante du discours des promoteurs de la dépénalisation de l’euthanasie. En Belgique, où l’aide à mourir est légale depuis près de 20 ans, les commentateurs soulignent les dérives largement documentées de la pratique des textes de loi. Une critique distincte encore du Luxembourg où la méconnaissance et le faible recours aux possibilités offertes par le législateur en 2009 interrogent.


 

 

 

Les obstacles auxquels font face les parlementaires sont d’autant plus nombreux que les situations de la fin de vie sont multiples. Pour André Moine, “il y a énormément de situations différentes avec des réglementations n’étant pas nécessairement toutes différentes”“Vous avez, et c’est déterminant pour la réglementation, une autonomie qui va être différente selon la personne. Et notamment si elle est en capacité d’exprimer sa volonté ou non”. Si le patient est apte à prendre librement et consciemment des décisions liées à sa fin de vie,  il y a lieu de déterminer quelle oreille doit lui prêter le médecin et quelles solutions il est en droit de lui proposer. Cependant, quand le patient n’est pas en capacité d’exprimer sa volonté, comment doit se dérouler la prise de décision sur son parcours de soins ?

 

L’importance donnée à cette volonté individuelle et à la force de son expression a ainsi été le premier chantier juridique relatif à la fin de vie.

 

... mais necessaire

Longtemps limités au cadre pénal, les débats sur l’accompagnement et la prise en charge des personnes en fin de vie ont connu de nouveaux horizons durant la seconde moitié du XXe siècle. Nouvelles perspectives médicales et revendications sociales ont poussé le législateur de l’époque à envisager la promotion d’une médecine à l’écoute de son patient jusqu’au bout de son parcours.

C’est justement le thème du rapport de Geneviève Laroque, Soigner et Accompagner jusqu’au bout (1986), qui clôture la première commission parlementaire à se saisir du sujet en France. Marquées par l’apparition de la médecine palliative en Angleterre et en Amérique du Nord au cours des années 1970, les décennies suivantes voient la relation thérapeutique remise en cause en Occident.

 

Saviez-vous quel role ont les medecins dans l'accompagnement des patients ? 

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Et il était temps. Juristes, professionnels de la santé et petients s'accordent sur l'importance qu'a eu la fixation d'un cadre législatif réglant les difficultés liées aux multiples hypothèses de fin de vie. Au tournant des années 2000 et sans arrêt depuis, la réflexion s'est élargie et enrichie de nouveaux compromis qui se traduisent  juridiquement par des lois souvent imparfaites, “mais c'est un moindre mal” selon Anbdré Moine. “Il vaut mieux une loi mal faite que pas de loi du tout” ironise - t - il.

 

Ce moindre mal a quand même de nombreux avantages en pratique. En France, “les lois Leonetti et Leonetti-Claeys ont été proposées pour répondre à des situations auxquelles on était confrontés et pour lesquelles on avait pas de réponse”, décrit le Directeur de l'unité de soins palliatifs d'Hayange, M. Villard.  Il évoque notamment “ces situations où l'on avait l'impression d'aller trop loin dans les soins il faudrait pouvoir arrêter ". Car jusque  l'année 2005, aucune procédure d'arrêt des soins n'existait.

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Les changements induits par la loi Leonetti-Claeys

 

Docteurs en medecine Wary et Villard

Sur ces points, un parallélisme existe entre nos trois pays. Mais le particularisme belge et luxembourgeois d’une euthanasie dépénalisée a produit d’autres effets que le mutisme du législateur français n’a pu produire. Selon une bénévole de l'ADMD Belgique, infirmière spécialisée dans la formation du personnel médical, la légalisation de l'euthanasie a beaucoup de vertus notamment la libération de la parole du patient et la levée du tabou de la mort en milieu hospitalier. Même si les chiffres en Belgique le nuance, André Poquet ajoute que cela a permis de faire sortir l'euthanasie de la clandestinité dans laquelle elle se pratiquait depuis des siècles. Autant de bienfaits que les parlementaires de chaque pays ont entrevu, avec, en ligne de mire, le rêve d'une démocratie sanitaire.

Le reve d’une “democratie sanitaire”

En 1999, le gouvernement français s’attaque à ces manques législatifs ressentis dans la pratique. Le 9 juin, une loi “visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs” est adoptée. Son article liminaire donne le ton : “toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et un accompagnement”. Rappeler l’égalité d’accès aux services publics est bien sûr le béaba dans une démocratie, mais on peut constater des limites à ce principe.

 

Au-delà de cette simple promesse, c’est avant tout l’harmonie de la relation entre personnel médical et patient qu’il fallut rétablir. Evoquant le tournant des lois de 2002 en Belgique, Constance du Bus constate un renversement de la relation thérapeutique. “Au siècle précédent, le soignant avait une certaine autorité et on a certainement tenu trop peu compte de la volonté du patient”, décrit-elle avant d’ajouter : “on bascule [aujourd’hui] dans l’excès inverse. Le patient a des droits mais il va jusqu’à les imposer au soignant”, regrette-t-elle. 

 

Juriste à l’Institut Européen de Bioéthique, elle tente de mettre des mots sur l’équilibre périlleux qui doit exister dans la relation entre un patient et son médecin. “La volonté du patient est première mais, à partir du moment où elle implique qu’un tiers agisse, on doit tenir compte de la volonté de ce dernier”. Elle met ainsi en exergue la tension qui règne entre le droit du patient à l’autodétermination et celui du médecin de refuser de procéder à un acte médical. Au sujet du virage pris par les lois adoptées en 2002 en Belgique sur la fin de vie, Constance du Bus dessine la difficile réforme de la relation thérapeutique entreprise par les législateurs des trois pays ces dernières années.


 


 

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Reconnu au début des années 2000, le droit de refuser un traitement sur le moment ou de manière préventive via la rédaction de directives anticipées marque un tournant décisif dans la synergie thérapeutique.

 

Mais de nouveaux écueils existent aujourd’hui. Entre rééquilibrage de la relation thérapeutique et excès inverse, il n’y a qu’un pas comme Constance du Bus nous l’explique. “On bascule dans l’excès inverse.  Le patient a des droits mais il va jusqu'à imposer ses choix au personnel soignant et requérir d’eux qu'ils posent des actes parfois contre leur volonté ou lui donnent des traitements jugés déraisonnables par les soignants”. Pour elle, la tension entre liberté du patient et autorité des personnels de santé reste importante. 

 

 

“En Belgique pour l'instant, on est dans une affirmation presque illimitée « du droit à l’autonomie » comme on l’entend souvent”.

 

 

Juridiquement pourtant, la force de décision du patient est toute relative. En France notamment où aux termes de la loi “le médecin doit accepter tout refus après avoir informé le patient de ses conséquences”.


 

Vidéo constance a réupload en quoi lois 2002 = tournant dans relation thérapeutique et risque de l’excès inverse

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Article 40 Loi du 29 Août 1998 relative aux établissements hospitaliers :

 

“Lors de son admission à l'hôpital ou à l'établissement hospitalier spécialisé, ainsi que pendant son séjour hospitalier le patient a, en vue de son consentement éclairé, droit à une information adéquate sur son état de santé ainsi que sur les traitements proposés.

 

Le patient a le droit de refuser ou d'accepter toute intervention diagnostique ou thérapeutique, sans préjudice des dispositions de l'article 7, alinéas 2 et 3, de la loi du 10 août 1992 relatif à la protection de la jeunesse.

 

En tout état de cause il a droit à une prise en charge visant à soulager sa douleur et sa souffrance”.

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Articles 7 et 8 de la loi 22 août 2002 relative aux droits des patients :

 

“Le patient a droit, de la part du praticien professionnel, à toutes les informations qui le concernent et peuvent lui être nécessaires pour comprendre son état de santé et son évolution probable”.

 

“Le patient a le droit de consentir librement à toute intervention du praticien professionnel moyennant information préalable”.

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Article L 1111-4 Code de la santé publique, issu de la Loi du 23 avril 2005 plusieurs fois amendé depuis : 

 

“Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé.

 

Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement. Le suivi du malade reste cependant assuré par le médecin, notamment son accompagnement palliatif.

 

Le médecin a l'obligation de respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix et de leur gravité”.

Une deraisonnable obstination

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En pratique, entre la proposition d’un traitement et le décès du patient, “le médecin doit l’inciter à accepter de le recevoir”. Cette interprétation du texte de loi réalisée par André Moine, maître de conférence en droit public est à nuancer par la pratique et ne peut être tenue pour telle comme un argument à l’encontre de l’éthique des soignants. Néanmoins, l’ombre d’un acharnement thérapeutique de bonne foi plane sur cette problématique.

 

Le troisième alinéa de l’article L 1111-4 du code de la santé publique va plus loin. Il jette les bases du droit pour tout patient au refus de recevoir un traitement.

 

“La personne malade peut s'opposer à toute investigation ou thérapeutique”. 

 

Complété le 5 mars 2002 par une loi dite “loi Kouchner”, le corollaire de ce libre consentement du patient à un traitement est également consacré : être en droit de connaître les détails sur son état de santé. Fondant par la même l’obligation pour les médecins de communiquer au patient les informations sur son état de santé, cette transparence nécessaire au bon fonctionnement d’une démocratie constitue aujourd’hui encore la première cause d’engagement de la responsabilité des soignants en France.


 


 

Inscrite en 2002 dans le marbre de la loi française, la “démocratie sanitaire” est un idéal aussi complexe et protéiforme que le régime politique homonyme. La relation entre le patient et le corps médical détenteur du pouvoir décisionnaire constitue le premier terrain de réflexion. C’est aussi le domaine dans lequel de nombreuses avancées sont demandées par la société civile.

Saviez-vous que les associations ont une place importante au coeur de ces questions ?

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Elles fonctionnent avec ou contre les décisions législtatives mais en tout cas, elles ont un rôle important à jouer dans les débats sur la fin de vie. 

 

Le volet "Société" met en lumière le travail fourni par les associations françaises, belges ou luxembourgeoises.

Vous avez en Belgique un phénomène très paradoxal. D'un certain côté un développement positif de la médécine. C’est quand même un pays où pour certaines maladies, on est à la pointe. Et puis, vous avez, à côté de cela, l’euthanasie. Ça peut paraitre paradoxal mais les deux se rejoignent. Parce qu’un patient, quand un traitement échoue et qu’on lui en propose un autre et encore un autre, au bout d’un certain moment, il est épuisé. Et donc l’acharnement thérapeutique en lui même peut très bien aboutir à ce que le patient demande l’euthanasie.

 

Constance Du Bus, juriste 

Via le développement des prises de décisions collégiales et l’interdiction de toute “obstination déraisonnable", le législateur de 2005 a souhaité poursuivre la démarche entamée sous les gouvernements précédents. Dans un rapport du 24 novembre 2004, Jean Léonetti, député UMP à l’origine de la loi relative aux droits des malades et à la fin de vie adoptée dans les mois suivants, explique : “ce faisant, c'est inscrire cette démarche dans celle que le législateur a engagée avec la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé et conférer une plus grande sécurité juridique à la relation de confiance entre le malade et le médecin”.

 

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La loi du 16 mars 2009 relative aux soins palliatifs, à la directive anticipée et à l’accompagnement en fin de vie.

 

Art. 2: Refus de l'obstination déraisonnable

 

« N'est pas sanctionné pénalement et ne peut donner lieu à une action civile en dommages-intérêts le fait par un médecin de refuser ou de s'abstenir de mettre en œuvre, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, des examens et traitements inappropriés par rapport à l'état de la personne en fin de vie et qui, selon les connaissances médicales du moment, n'apporteraient à la personne en fin de vie ni soulagement ni amélioration de son état ni espoir de guérison.

 

La disposition qui précède s'entend sans préjudice de l'obligation pour le médecin soit de prodiguer lui-même à la personne en fin de vie les soins palliatifs définis à l'article qui précède soit de les initier. »


 

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La Belgique ne consacre pas de texte législatif à l’interdiction de l’obstination déraisonnable. Elle met à disposition des patients la possibilité de rédiger leur déclaration anticipée pour cela.

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Article L 1110-5-1 du code de la santé publique introduit par la Loi Leonetti Claeys du 2 février 2016

 

« Les actes mentionnés à l'article L. 1110-5 ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu'ils résultent d'une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu'ils n'ont d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris, conformément à la volonté du patient et, si ce dernier est hors d'état d'exprimer sa volonté, à l'issue d'une procédure collégiale définie par voie réglementaire.

 

 La nutrition et l'hydratation artificielles constituent des traitements qui peuvent être arrêtés conformément au premier alinéa du présent article.

 

Lorsque les actes mentionnés aux deux premiers alinéas du présent article sont suspendus ou ne sont pas entrepris, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins palliatifs mentionnés à l'article L. 1110-10. »

 

 

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Le regime des directives anticipees et de la personne de confiance

 

 

 

 

Les directives anticipées apparaissent comme la solution ultime apportée au problème de prise en compte des souhaits du patient. Deux intérêts derrière cela, faire respecter la volonté du patient d’une part, et de l'autre, protéger les professionnels de santé dans la réalisation de certains actes médicaux. France, Luxembourg et Belgique ont organisé la possibilité pour les patients de mettre à l’écrit leurs volontés de fin de vie et de désigner la personne qui s’en ferait porte parole le cas échéant.

 

Comme l’explique le chef de l’unité de soins palliatifs d’Hayange, docteur Wary, “les directives anticipées c’est quelque chose d’individuel qui dépend d’un individu et d’une situation”. Comme il le rappelle plus loin, il possède en tant que soignant l’obligation de les proposer au patient. Et surtout, il a mission d’aider à leur rédaction. C’est “de dire au patient, voilà les risques et voir alors ce que l’on peut faire”.

 


 

Car ce document dont la force est contrastée se situe au carrefour de la fin de vie, des droits du patient et avant tout, des diverses situations dans lesquelles il peut se trouver. Mais que ce soit en France, au Luxembourg ou en Belgique, elles n’interviendront qu’à condition que le patient soit en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable et soit dans l’incapacité d’exprimer sa volonté. Leur utilité est donc subordonnée au caractère irréversible de la pathologie, à l’impossibilité en l’état actuel de la science de la traiter, mais aussi à l’état d’inconscience ou d’absence de lucidité du patient.

 

En France, comme chez ses voisins du Benelux, ces conditions sont fixées par la loi. Néanmoins, l’utilité des directives anticipées est orientée différemment selon le pays. Juridiquement, la Belgique et le Luxembourg distingue les directives, plutôt appelées déclarations anticipées, selon qu’elles traitent ou non de la volonté de bénéficier d’une euthanasie. Juridiquement, la Belgique possède le fonctionnement le plus cloisonné avec depuis 2002, cinq types distincts de déclarations anticipées - pour refus de soin ou non acharnement thérapeutique, euthanasie, don d’organe, don du corps à la science et dernières volontés en matière de sépulture et d’obsèques.

 

De son côté, le Luxembourg se limite à un dualisme simple : les déclarations anticipées pour tout ce qui concerne les conditions souhaitées pour une mort naturelle, et les dispositions de fin de vie pour tout ce qui tient des conditions et du moment où l’on souhaite recevoir une euthanasie.

Les soins palliatifs, cadre premier de la fin de vie

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La fin de vie n’est pas nécessairement synonyme de souffrance ou de vieillesse. L’âge est d’ailleurs exclu des critères de définition de celle-ci. La principale cause de cette impasse thérapeutique est le cancer. Viennent ensuite les pathologies liées à l’âge, autres maladies dégénératives et les accidents. Quand la médecine ne peut plus apporter au patient qu’un apaisement de la souffrance, un soutien moral ou garantir une fin de vie digne, elle devient palliative. L’articulation des traitements curatifs et des traitements palliatifs est un enjeu majeur de la prise en charge des patients. La continuité des soins, c’est-à-dire l’imbrication des premiers et des seconds, est encouragée tant par les associations que par les différentes politiques.  

 

Consacré en 1999 alors que Martine Aubry était Ministre de la Santé, le politique français est le premier à évoquer “le droit pour toute personne dont l’état le requiert à bénéficier des soins d’accompagnements, parfois appelés soins palliatifs”. Reconnu en 2002 en Belgique et en 2009 au Luxembourg, ce droit bénéficie aux personnes “se trouvant à un stade avancé ou terminale d’une maladie grave, évolutive et mettant en péril le pronostic vital, quelle que soit son espérance de vie”.

 

Définis en 1990 et précisés en 2002 par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) les soins palliatifs visent à “améliorer la qualité de vie des patients et leur famille confrontés aux conséquences d’une maladie potentiellement mortelle [...]” Pluridisciplinaires, les soins palliatifs ont pour but de soulager les souffrances physiques et psychiques qui ne peuvent être traitées.

“Les soins palliatifs n’ont vocation ni à accélérer ni à retarder la mort”. Cette précision de l’OMS exclut donc la pratique euthanasique et tout acharnement thérapeutique dans le cadre palliatif. Pourtant, en Belgique et au Luxembourg, l’euthanasie et le suicide assisté peuvent être pratiqués dans n’importe quel cadre médico-légal, tant que la procédure établie par la loi est respectée.

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Article 1 loi 9 juin 1999 

 

« Toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement.

 

Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage. »

 

Circulaire du 19 février 2002 relative à l'organisation des soins palliatifs et de l'accompagnement

 

 


 

La sedation profonde, securiser un dispositif palliatif

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L’euthanasie

Elle faisait partie des grandes promesses de François Hollande pendant sa campagne présidentielle de 2012, la légalisation de l’euthanasie en France. Mais quatre années plus tard, l’hexagone aboutit sur une loi  Leonetti qui n’en promulgue pas la pratique. Pourtant, même si de nombreux  sondages montrent que 9 français sur 10 y seraient favorables, toutes les propositions législatives en ce sens ont été rejetées. Caroline Fiat, députée de Meurthe et Moselle et membre de la Commission parlementaire sur la fin de vie, en a fait l’expérience. En 2017, l'ex-infirmière en soins palliatifs et plusieurs autres membres de la France Insoumise (Alexis Corbière, Danièle Obono) ont déposé une proposition de loi pour légaliser l'euthanasie. 

Si l'euthanasie est un précipice ; le législateur français ne peut pas faire un pas de plus, il est au bord.

 

 André Moine, maître de conférence.

Mais la France n’est pas un cas isolé. Seuls 5 pays dans le monde ont passé le pas de l’euthanasie. Au premier rang desquels, figure la Belgique.

 

Au Luxembourg, sous le gouvernement d’alliance de Jean-Claude Juncker, le pays se déchire. L’adoption de ce texte entraîne le refus du Grand Duc René de signer le texte pour montrer sa désapprobation en évoquant une "raison de conscience". Or, sa signature est rendue nécessaire par l’article 34 de la Constitution du Grand Duché qui énonçait alors en 2009 : “le Grand Duc sanctionne et promulgue les lois dans les trois mois du vote de la Chambre”. Un amendement est alors voté par les députés pour supprimer cette obligation d’approbation des lois. Le Grand Duc signera tout de même cette loi et ce sera la dernière.


 

- Corinne LSV Raisons religieuses

Saviez-vous que des raisons religieuses peuvent egalement entrer en jeu ?

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Dans beaucoup de religions, l'euthanasie pose un problème et est décriée. Cependant, la religion, pour les praticants, peut parfois apporter un certain réconfort face à des situations de fin de vie. 

 

Le volet "Culte" s'essaye à montrer l'articulation entre médecine et croyance religieuse. 

La volonte de fixer un cadre strict

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La qualification du deces

 

Dix ans après la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté en 2009 le Luxembourg se dote d’une nouvelle loi. Adoptée en juillet 2019, celle-ci permet de qualifier la mort choisie en “mort naturelle”. Autrefois, cette mort était dite “résultant d’un suicide”. Ce changement sémiologique est important puisque grâce à ça les héritiers peuvent bénéficier des différentes assurances vies potentiellement souscrite par le défunt. Une clarification qui s’est avérée indispensable après la confrontation de la loi à son application sur le terrain. En dix ans 71 personnes ont eu recours aux dispositifs permis par la loi. En Belgique, cette requalification était intervenue quelques mois seulement après la mise en place de la loi.

Des evolutions differentes

Une même dépénalisation pour une évolution et des textes différents. Si la Belgique et le Luxembourg ont passé le cap de la légalisation, ce n’est pas pour autant que les deux pays suivent le même chemin hier comme aujourd’hui. 

 

La Belgique a par exemple étendu l’application de sa loi en février 2014 aux mineurs avec des conditions strictes. Une ouverture que certains belges ne comprennent pas et ont du mal à accepter. Certains critiquent les dérives qui peuvent en découler. Il prennent comme exemple l’affaire Mortier dans laquelle Madame Godelieve De Troyer, atteinte de dépression chronique, fut euthanasiée en 2012 après avoir payé une association pour la pratiquer. Non informés, les enfants ont remis en cause la légitimité de cette euthanasie. Ils critiquent aussi le manque d’indépendance de la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie, en charge de vérifier la légalité des actes euthanasiques et de suicide assisté. 

 

Ce phénomène, d'extension de la loi belge, n’est pas du tout celui observé au Luxembourg. Alors que la Belgique élargit le droit, le Luxembourg en durcit la mise en oeuvre.

 

S’agissant du Luxembourg et de la France, Jean Jacques Schonckert  considère que “les deux lois sont mal faites”. Non respect des hôpitaux pour raison religieuse, “euthanasies cachées” et “manques d’informations” sont selon lui les principaux problèmes. 

 

En France, aucun texte ne condamne explicitement la pratique de l’euthanasie. Cet acte est donc pénalement réprimé en tant que homicide volontaire et passible de 30 ans de réclusion criminelle, la peine la plus lourde existant sur le territoire national. En Belgique et au Luxembourg, la légalisation de l’assistance à mourir s’est accompagnée de la dépénalisation de ce geste. Son auteur, le soignant généralement, n’est donc pas passible de poursuites pénales, sous réserve que ce geste ait été pratiqué en respectant la procédure légale.

 

Le sens donné est donc différent. Dans les pays qui ont légalisé ces pratiques, le patient est considéré comme étant décédé de mort naturelle. L’assistance du tiers n’étant pas un crime car elle découle du consentement du malade et vise à lui apporter la réponse adaptée à sa volonté.

 

 

“Un Etat de Droit, c’est quand les questions majeures sont réglées par le droit”, rappelle André Moine, maître de conférence en droit public à l’Université de Lorraine. “Le corps médical a apprécié qu’on le délivre de ces choix en les encadrant juridiquement”.

 

Comme il le rappelle ensuite, “les arrêts de soins ont toujours existé mais ils étaient pratiqués en dehors de tout cadre juridique”. Car, à l’instar de la Belgique et du Luxembourg, clandestinité rime ici avec homicide volontaire.

 

En Belgique, le cadre strict qu’avait souhaité adopter le législateur en 2002 apparaît inopportun. Constance du Bus, juriste a l’Institut Européen de Bioéthique explique que “ce que l'on constate, c’est que le nombre d euthanasie clandestine n’a pas diminué et même au contraire”. Cela s’explique selon elle par l’absence de contrôle de la déclaration par le médecin des euthanasies qu’il pratique.

 

A cet égard, le procès de Tine Nys qui s’est conclu le 31 mars 2020 par l’acquittement des trois médecins ayant participé à son euthanasie est révélateur de l’ineffectivité des conditions posées par la loi.



 

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Le rôle du médecin dans les décisions liées à la fin de vie d'un patient est primordial mais pas toujours très précis. 

 

Le volet "Santé", accesible en cliquant sur Jacqueline, expose cette relation entre les deux parties. 

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Loi du 14 mai 2002 relative aux soins palliatifs amendée le 21 juillet 2016 

 

 

Les soins palliatifs sont “l’ensemble des soins apportés au patient qui se trouve à un stade avancé ou terminal d’une maladie grave, évolutive et mettant en péril le pronostic vital, et ce quelle que soit son espérance de vie. Un ensemble multidisciplinaire de soins est garanti pour assurer l’accompagnement de ces patients, et ce sur les plans physique, psychique, social, moral, existentiel et, le cas échéant, spirituel. Les soins palliatifs tendent à garantir et à optimiser aussi longtemps que possible la qualité de vie pour le patient et pour ses proches et aidants proches. Les soins palliatifs sont prodigués dès le moment où le patient est identifié comme palliatif jusqu’à et y compris la phase terminale. Les soins palliatifs peuvent également être entamés alors que des traitements sont encore en cours jusqu’aux soins liés pour les proches et aidants proches jusqu’ après le décès. Idéalement, le recours aux soins palliatifs se fait de façon progressive en fonction des besoins et souhaits en matière de soins, quelle que soit l’espérance de vie.

 

Un arrêté royal du 21 octobre 2018 détaille les critères d'identification d’un patient palliatif en citant notamment la mort possible de ce dernier dans les 6 à 12 mois.


 

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Loi 16 mars 2009. Art. 1er. – Énoncé du droit aux soins palliatifs et définition

 

« Toute personne en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, désignée ci-après par les termes «la personne en fin de vie », a accès à des soins palliatifs. Les soins palliatifs sont des soins actifs, continus et coordonnés, pratiqués par une équipe pluridisciplinaire dans le respect de la dignité de la personne soignée. Ils visent à couvrir l’ensemble des besoins physiques, psychiques et spirituels de la personne soignée et à soutenir son entourage. Ils comportent le traitement de la douleur et de la souffrance psychique.»

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La sédation palliative est définie comme l’utilisation de médicament(s) sédatif(s) visant à diminuer de façon volontaire le niveau de conscience d’un patient en fin de vie, l’objectif étant de contrôler un ou des symptôme(s) réfractaire(s) et jugé(s) insupportable(s) par le patient. 

 

Définition tirée du guide officiel des soins palliatifs belge

La sédation profonde est peut-être la notion la plus méconnue ou que l’on croit connaître à tort. Car la frontière entre sédation profonde et euthanasie prête à confusion et les différents acteurs qui participent aux débats sur la fin de vie aiment  jouer de cette ambiguïté à leur profit. Pourtant, comme le rappelle Constance du Bus, spécialiste de la bioéthique et des questions de fin de vie, “la  sédation et l’euthanasie ont des approches totalement différentes”. Revenant sur l’intérêt réel porté par la sédation palliative, elle résume leur distinction en trois points.

Cette visée  palliative est donc le critère clé. C’est pourquoi en Belgique et au Luxembourg les autres protocoles palliatifs ne sont pas détaillés dans les textes législatifs. Cela tient de la médecine. Ainsi, médicalement, il appartient au patient de la demander et s’articule le plus souvent avec un arrêt des soins.

 

“Tant du côté de la population que des soignants il y a beaucoup de confusion autour de toutes ces notions”, insiste la représentante de l’Institut Européen de Bioéthique. En Belgique, l’appel à instituer l’obligation pour les médecins de déclarer le recours à la sédation, à l’instar de l’euthanasie, est symptomatique de cela. La crainte d’un détournement euthanasique ou du moins, la méconnaissance de ce qui distingue ces deux procédés conduit à des situations paradoxales où des procès ont visé des médecins ayant pratiqué une sédation palliative peu de temps avant le décès de leur patient.


 

L’intention n’est pas la même. L’intention de la sédation c est d endormir le patient pour le soulager, en aucun cas de produire sa mort contrairement à l’euthanasie. Le processus est différent parce qu on  n utilise pas les mêmes procédés : sédatifs et dose létale. Et troisièmement, le résultat est différent. La sédation n'aboutit pas à la mort alors que l'euthanasie provoque instantanément la mort.

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Pas besoin néanmoins de noircir le tableau. Selon cette observatrice juridiquement formée à la question et qui dispense dans le cadre des actions de l’IEB des formations aux soignants sur ces notions, l’augmentation du nombre de sédation en Belgique est aussi liée à une meilleure connaissance et gestion des souffrances de la personne en fin de vie. Reste que la sédation n’a pour but que d’apaiser les souffrances réfractaires, qui ne peuvent être traitées. Ce n’est donc qu’un élément de l’arsenal palliatif qui concerne seulement quelques pourcents de la population en fin de vie. Pourtant, on observe en France que sa consécration législative en 2016 a enflammé le débat et mis en avant la philosophie dévoyée qui l’anime.

Le détournement français de la sédation profonde

En France, la pratique de la sédation profonde a été légalisée par la loi leonetti-Claeys de 2016. Le rapport qui l’introduit précise les intentions qui la portent: “s’inscrire dans la continuité de la démarche entamée précédemment à savoir, garantir de nouveaux droits aux patients”. Contrairement à ses voisins, la sédation profonde est donc le fruit d’une évolution progressive des moeurs.

La Belgique et le Luxembourg ont fait le choix de reconnaître cette pratique pré-établie et de réaffirmer sa visée palliative différente de l’euthanasie ou du suicide médicalement assisté. L’absence de texte législatif spécifique à la sédation continue jusqu’au décès révèle la différence de conception avec la France. 

 

La méconnaissance des notions relatives à ce procédé est d’autant plus vraie dans l’Hexagone, que l’on parle même de dérive. En France, la sédation profonde est prônée pour sa finalité : endormir le malade jusqu’à son décès. Le terme d’hypocrisie est alors invoqué par bon nombre d’acteurs, qui voient dans ce compromis législatif, une forme de lâcheté parlementaire et par extension politique.


 

Pour le juriste André Moine, le constat mérite quelques ajustements de discours. Selon lui, avec la légalisation de la sédation profonde “le législateur est allé jusqu’au bout”. On accepte d’administrer une substance pour accompagner vers la mort sans douleur, on ne la précipite pas. “Je ne pense pas que ce soit de l’hypocrisie. C’est le choix français contemporain”, estime-t-il. Si l’euthanasie est un gouffre ou une pente glissante et infernale, le législateur français est au bord et ne peut faire un pas de plus sans choisir cette voie. André Moine.

 

Juridiquement pourtant, l’article L 1110-4 du code de la santé publique autorise le doute quant à la volonté qui en est à l’origine. Il précise que la sédation profonde n’est pas un traitement mais qu’elle se couple nécessairement à l’arrêt de tous les traitements. L’objectif annoncé étant la lutte contre l’obstination déraisonnable, elle procède d’un patient dont le pronostic vital est engagé à court terme ou le devient par la même. Décriée par des défenseurs de la légalisation de l’euthanasie, la loi a repris la décision du conseil d’Etat de reconnaître comme traitement la nutrition et l’hydratation. En définitive, la sédation profonde est donc un procédé que les politiques ont souhaité tourner vers la finalité - la mort douce et apaisée - et non la raison d’être - apaiser les souffrances réfractaires pour finir sa vie sans douleur.


 

Si les médecins remercient la protection juridique que leur offre cette loi tout en s’étonnant de la consécration d’une pratique parfaitement installée et ce depuis des années, l’interprétation de cette loi par la société française est moins clémente. Magnanime, André Moine défend malgré tout ce texte.


 

Je pourrais avoir une impression en tant que juriste que la loi actuelle n'est pas mal faite. Le cadre législatif me semble adapté à la société actuelle. On refuse l'euthanasie tout en permettant l'arrêt des traitements et une sédation profonde ayant, à terme, les mêmes effets. En l’état de la société contemporaine, l’équilibre me semble trouvé  Donc je ne vois pas de modification législative à court terme sauf à que cette loi soit mieux appliquée.

 

André Moine
 

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Institué par la Loi “Claeys-Leonetti, l'article L 1110-5 du Code de la Santé Publique défini le cadre de cette pratique.

 

« Art. L. 1110-5-2.-A la demande du patient d'éviter toute souffrance et de ne pas subir d'obstination déraisonnable, une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie et à l'arrêt de l'ensemble des traitements de maintien en vie, est mise en œuvre dans les cas suivants :

 

« 1° Lorsque le patient atteint d'une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements ;

 

« 2° Lorsque la décision du patient atteint d'une affection grave et incurable d'arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d'entraîner une souffrance insupportable.

 

« Lorsque le patient ne peut pas exprimer sa volonté et, au titre du refus de l'obstination déraisonnable mentionnée à l'article L. 1110-5-1, dans le cas où le médecin arrête un traitement de maintien en vie, celui-ci applique une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie.

 

« La sédation profonde et continue associée à une analgésie prévue au présent article est mise en œuvre selon la procédure collégiale définie par voie réglementaire qui permet à l'équipe soignante de vérifier préalablement que les conditions d'application prévues aux alinéas précédents sont remplies.

 

« A la demande du patient, la sédation profonde et continue peut être mise en œuvre à son domicile, dans un établissement de santé ou un établissement mentionné au 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.

Toutes les situations sont differentes en fonction des patients. Le volet "Sante" aborde ce sujet.

Également animé de ce désir de sécuriser la pratique de l’euthanasie, le Luxembourg en a quant à lui légalisé la pratique, à certaines conditions, en 2009. Mais le caractère éminemment subjectif des conditions d’appréciation de la demande d’euthanasie ne reçoit pas la même interprétation de chaque côté de la frontière.

 

Car si certains critères sont similaires (tel que l’accès à l’euthanasie pour une personne souffrant d’une pathologie incurable et irréversible ou à la suite d’un accident), leur cadre et leur application ne sont pas les mêmes. Au Luxembourg, où les euthanasies sont moins nombreuses qu’en Belgique (71 depuis la loi de 2009 jusqu'en 2019), la souffrance peut être ou physique ou psychologique. Les souffrances doivent toutes êtres “constantes, insupportables et sans perspective d’amélioration” selon le contexte médico scientifique (Cinquième Rapport de la Commission de Contrôle daté de 2018 pour les années 2017-2018). Des éléments se vérifiant par des entretiens entre médecins et patients.

 


 

Des caractères subjectifs, comme le confirme dans un guide, les Ministères de la santé et de la sécurité sociale luxembourgeois: “si certains facteurs objectifs peuvent contribuer à estimer le caractère insupportable de la souffrance, l’appréciation de la souffrance insupportable est en grande partie une question subjective et personnelle du patient et dépend de sa personnalité, de son seuil de perception de la douleur, de ses conceptions et des valeurs qui lui sont propres”.

 

Cette subjectivité, le législateur ne peut y couper. Appartenant aux soignants d’apprécier au cas par cas le degré de gravité de la souffrance des patients.  Le contrôle de cette appréciation est ensuite réalisé par un organisme national dédié, qui a le pouvoir de soumettre à la justice toute euthanasie mal réalisée.

 

Si l’un des arguments à l’origine de la légalisation de l’euthanasie était de mettre fin aux euthanasies clandestines, un contrôle efficace est un garde-fou nécessaire afin que ces euthanasies ne soient pas pratiquées de manière illégale. Maïs Belgique et Luxembourg n’ont pas choisi la même méthode de contrôle. En Belgique, un contrôle a posteriori est réalisé à partir des éléments fournis par le médecin qui l’a pratiquée. Dans ses rapports successifs, la Commission Fédérale de Contrôle et d’Evaluation de l’euthanasie souligne son incapacité à estimer le nombre d’euthanasies réellement pratiquées.

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Connaissez-vous l'affaire Tine Nys ? 

Le médecin qui accepterait de pratiquer une euthanasie ou une aide au suicide est tenu d’une procédure stricte. Informer le patient de son état de santé, s’assurer du caractère libre et éclairé de la volonté du patient au fil de plusieurs entretiens, s’entretenir avec un autre médecin et recueillir son avis, et consulter la CNEC afin de vérifier si son patient a rédigé un “testament de vie”.

 

Dans les 8 jours suivants, le soignant a alors l’obligation de l’enregistrer dans les registres de la CNEC. Cette obligation n’existe pas en Belgique, où le médecin doit y procéder de façon volontaire. Or, “ce que l’on constate [en Belgique], c’est que le nombre d’euthanasies clandestines n’a pas diminué et même au contraire. On estime que deux tiers des euthanasies ne sont pas déclarées. Car on ne contrôle pas si cette déclaration est bien effectuée. Des médecins nous ont avoué ne pas avoir déclaré ces euthanasie car c’est une affaire entre eux et leur patient”, témoigne Constance du Bus.


 

Loi du 28 mai 2002 - définition de l’euthanasie

 

Art. 2. Pour l'application de la présente loi, il y a lieu d'entendre par euthanasie l'acte, pratiqué par un tiers, qui met intentionnellement fin à la vie d'une personne à la demande de celle-ci.

Juriste à l’Institut Européen de Bioéthique, elle tente de mettre des mots sur l’équilibre périlleux qui doit exister dans la relation entre un patient et son médecin. “La volonté du patient est première mais, à partir du moment où elle implique qu’un tiers agisse, on doit tenir compte de la volonté de ce dernier”. Elle met ainsi en exergue la tension qui règne entre le droit du patient à l’autodétermination et celui du médecin de refuser de procéder à un acte médical. Au sujet du virage pris par les lois adoptées en 2002 en Belgique sur la fin de vie, Constance du Bus dessine la difficile réforme de la relation thérapeutique entreprise par les législateurs des trois pays ces dernières années.

En Belgique, un contrôle à la marge

 

 

Au Luxembourg, le contrôle est réalisé par la Commission Nationale d’Evaluation et de Contrôle. Contrairement à la Belgique, cet organe de contrôle transmet aux parlementaires un rapport tous les deux ans jugeant de la bonne application de la loi et faisant une étude statistique de son application. Cette vision globale et distanciée fait ressortir plusieurs points saillants.

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